25/09/09

19:04 Les réseaux sociaux et la vacuité du buzz
Je ne vous ferai pas injure en expliquant ce qu'est un réseau social (Wikipedia le fait mieux que moi). Par contre, qu'est-ce que le buzz ? Le buzz c'est "tout le monde en parle", peu importe si c'est quelque chose d'utile, d'important ou pas du tout. C'est un peu le marketing poussé à l'extrême.

Pour faire notre étude de cas, intéressons-nous au réseau social le plus hype du moment : Twitter (qui a pu sérieusement penser qu'il s'agissait de FaceBook ?!). Twitter étant hype, il est peuplé de gens hypes. Des gens comme des Community manager au chômage. Ah ben oui, quand on invente un nouveau métier, des fois c'est pas évident de montrer son importance et sa plus-value à une entreprise. Surtout qu'en temps de crise, l'entreprise se rapproche de son coeur de métier : elle "revient aux fondamentaux" comme on dit dans le sport. Bref, nous avons donc foultitude de gens hypes et inoccupés (ainsi que des gens pas hypes et occupés, mais ils n'ont pas un grand rôle pour la suite).

Qu'est-ce qui est hype sur Twitter en ce moment ? Le "twalendrier". Alors, oui, le nom est assez ridicule, mais quand on sait que des gens qui se servent de Twitter se nomment entre eux "twittos", on ne s'étonne plus de rien. Si vous n'avez pas entendu parler du "twalendrier", c'est normal : vous n'êtes pas sur Twitter. Ou alors vous ne suivez pas plus de 15 personnes.

Qu'est-ce que le "twalendrier" ? C'est très simple : c'est un calendrier fait par des gens qui sont sur Twitter. Oui, comme les calendriers de La Poste ou des Dieux du stade. D'ailleurs certains proposent de nommer le-dit calendrier "Le calendrier des dieux et des déesses du Tweet". Sic. Et l'idée est de reverser les bénéfices à une association. Quelle association ? Pas encore décidée à l'heure actuelle (ça fait 4 jours que le projet est lancé hein). Mais il y a déjà plus de 100 personnes qui ont décidé de s'impliquer. Si si.

En fait, pour comprendre comment on a pu en arriver là, il faut avoir à l'esprit que sur Internet, l'immédiat prend souvent le pas sur la réflexion. Avec Twitter encore plus, puisque la communication est "instantanée". Petite chronologie :

• En regardant le nouveau calendrier des "Dieux du stade" une personne lance à voix haute "ça serait bien d'en faire un".
  Bah oui, après tout, il n'y a que les calendriers des pompiers, des éboueurs, de La Poste, Pirelli, Dieux du Stade, du club de foot local... C'est un marché pas du tout saturé et n'importe qui rêverait d'avoir les photos d'anonymes n'ayant pour seul point commun d'être présent sur le même réseau social.


• L'information est relayée, les gens adhèrent au concept et s'enflamment dessus. A tel point qu'il est décidé de faire 2 calendriers : un pour les femmes et un pour les hommes.
  Si mon voisin en est, c'est que ça doit être bien, donc faut que j'en sois. C'est le principe du hype en fait. Notez bien que personne à l'heure actuelle ne sait s'il faudra poser nu ou habillé, s'il y a une thématique, si les photos seront couleurs ou N&B, voire tout simplement réussies...


• Une organisation se met en place. Avec comme premier projet de choisir le nom de domaine du futur site hébergeant le futur calendrier.
  Là, c'est très amusant : on voit de suite que le parti pris du buzz dépasse celui du produit. Pour parler de quelque chose sur internet, il faut avoir une adresse web à montrer. Peu importe si le produit n'existe pas, l'important c'est de pouvoir en parler.


• Dans la foulée est créé un compte Twitter spécifique, un blog et une page FaceBook. (Un forum viendra s'y ajouter).
  De cette façon, le buzz s'auto-entretien : le compte Twitter répète tout ce qui touche au calendrier dit par d'autres. Le blog permet de suivre l'info (et d'insérer un pied dans la blogosphère, tant qu'à faire). La page FaceBook enfin permet d'informer les futur-has been de ce qu'ils ratent.


• Les personnes impliquées se servent de leurs blogs pour parler de l'idée du siècle (et ça va loin : "Le twalendrier, ou un formidable élan de solidarité via twitter". Rien que ça. Non, on ne sait toujours pas quelle est la cause choisie pour un tel élan de solidarité). Bien entendu le site du calendrier liste toutes les personnes en parlant : pour faire monter la sauce, il faut que le serpent se morde la queue...
  Certains analystes avaient vus avec Twitter la mort des blogs. Raté : Twitter ne tue pas les blogs, Twitter fait en sorte que les blogs parlent de Twitter. Fort non ?


• Une fois le nom de domaine choisi, un sondage est lancé pour savoir quel outil de payement va être employé pour que les gens puissent acheter leur super calendrier.
  Le produit n'existe toujours pas. On ne sait pas quelle est la dimension finale retenue. On ne sait pas combien seront mis en vente. On ne sait pas à quel prix. Mais on débat déjà de savoir si on pourra le payer par PayPal ou non.


• Actuellement, un recensement des modèles et des photographes est en cours afin de s'assurer que chacun pourra faire sa photo.
  Mais on ne sait toujours rien des contraintes techniques des dites photos. Et il va en falloir pour proposer quelque chose de cohérent. Déjà qu'il y a pratiquement 50 personnes à se faire prendre en photo par calendrier, soit un peu plus de 4 par mois...


• Depuis ce matin, un sondage est en place afin de savoir quelle association subventionner.
  Il était temps...